L’épigénétique est une discipline faisant partie de la biologie. Elle étudie les mécanismes moléculaires qui modulent l’expression du patrimoine génétique en fonction du contexte. Autrement dit, le milieu dans lequel nous avons évolué contribuera à façonner notre identité.
La génétique étudie les gènes tandis que l’épigénétique s’intéresse à une série d’informations complémentaires qui définissent la manière dont ces gènes vont être utilisés par une cellule ou ne pas l’être. Cette approche dément la « fatalité » des gènes.
Ces signaux, y compris ceux liés à nos comportements – comme le tabagisme, le type d’alimentation, le stress – peuvent conduire à des modifications dans l’expression de nos gènes, sans affecter leur séquence. Le phénomène peut être transitoire, mais il existe des modifications épigénétiques durables qui persistent même quand le signal qui les a induites disparaît.
Toutes les cellules d’un organisme multicellulaire disposent d’un patrimoine génétique analogue. Cependant, elles l’expriment de manière différente selon le tissu auxquelles elles appartiennent (foie, cœur…).
Ainsi, chez les abeilles, les possibilités d’évolution d’un même œuf en mâle ou femelle puis en reine ou en ouvrière prouvent que des mécanismes spécifiques peuvent relier des facteurs environnementaux et l’expression du patrimoine génétique.
On peut ainsi noter des phénomènes d’adaptation d’une espèce à son environnement : des traits peuvent être acquis, transmis d’une génération à une autre puis être perdus après avoir été hérités. Notre comportement influe sur nos gènes mais aussi l’environnement. Ce qui explique notamment le polyphénisme, la capacité de changer de couleur en fonction de la saison comme le renard polaire qui devient blanc en hiver.
L’épigénétique ouvre à des applications dans plusieurs discipline : la nutrition, la biologie du développement, l’agronomie et la médecine avec la création « d’épi-médicaments » dans le traitement des cancers.
Depuis 2010 on sait que l’épigénétique possède un impact sur les neurones par le biais des connexions synaptiques, notamment en ce qui concerne la mémoire à long terme. Les stress infantiles entraînent une sensibilité au stress à l’âge adulte en agissant sur des processus de transformation de l’ADN.
On pourrait comparer génétique et épigénétique dans la diffférence entre l’écriture d’un livre et sa lecture par le public. Une fois le livre publié, le texte (ou les gènes, une information stockée sous forme d’ADN) sera le même pour tous les lecteurs. Pourtant, chacun d’entre eux aura une interprétation plus ou moins différente de l’histoire. Celle-ci entraînera des émotions singulières au fil de la lecture.
L’épigénétique assure donc plusieurs lectures d’une matrice fixe – livre ou code génétique – ; cette lecture donne lieu à des interprétations diverses selon les conditions selon lesquelles elle est interrogée.
Aux mécanismes de transmission de la base de donnée génétique s’ajoute alors celui de la façon de piocher dans cette base rigide, et c’est la somme des deux qui permet de comprendre l’utilisation qui en est faite. Ainsi, l’expression de l’héritage génétique dépend d’un héritage épigénétique. Le système gènes plus environnement donne naissance au phénotype d’un individu qui enrichit la notion de génotype, l’ensemble des caractéristiques génétiques d’un individu qui se retrouvent normalement chez tous les membres de son espèce.
Plusieurs études américaines tendraient à démontrer que les gènes se modifient au cours de l’existence, ceci au gré des situations vécues. L’ADN ne cesserait de se modifier en permettant une adaptation, positive ou non, au mode de vie, aux expériences vécues. Le patrimoine génétique serait donc capable de transformations en fonction de notre style de vie, du milieu social dans lequel nous évoluons, du climat et de la pollution, du stress et des événements personnels. En somme, ce phénomène pourrait nous permettre une adaptation réussie mais aussi entraîner des désordres physique ou psychiques, voire des maladies.
Selon la psychogénéalogie, nous transportons, sans le savoir, les problématiques de nos ascendants et nous reproduisons fréquemment des schémas de vie identiques. Ainsi des événements souvent traumatiques (accidents, suicides, maladies, pertes diverses) se reproduisent sur plusieurs générations et, parfois, à la même date, au même âge ou presque comme l’a montré le livre de Anne-Ancellin Schützenberger Aïe Mes aïeux. En partant de l’hypothèse épigénétique, une prise de conscience de ses mécanismes, grâce à un psychothérapeute, pourrait permettre à la personne de s’en libérer.
Luce Janin Devillars